Les danses macabres

LES DANSES MACABRES

Historique et évolution
Cet "art macabre" voit son apogée entre le XIVè et le XVIè siècle, à une époque sombre, où une réflexion et une prise de conscience sur la vie et la mort se développe. Les guerres (dont la Guerre de Cent Ans), la famine et les grandes maladies comme la peste sont les éléments majeurs, qui font de la mort quelque chose de plus traumatisant et omniprésent dans la vie quotidienne de tous.

Les danses macabres sont des oeuvres le plus souvent gravées ou peintes, dans la littérature, la peinture ou la sculpture. On retrouvent également des poèmes souvent anonymes en latin, italien, français et allemand. Elles représentent des squelettes en compagnie de personnages représentants toutes les couches sociales existantes. Des papes, des moines, des empereurs, des paysans, des bourgeois, des soldats... Ils vont tous vers un destin commun, la mort.

C'est une évolution de la représentation de la mort, qui jusqu'à présent montrait le corps mourant, encore apte à dire un dernier voeu. A contrario, la danse macabre entraîne de suite le personnage vers la pourriture, la mort devenant insensible aux inégalités sociales.


A propos de quelques représentations, et de l'origine des danses macabres, je vous cite une partie de l'article de Wikipedia, bien détaillé à ce sujet:

À l'origine, la Danse macabre constituait le sujet de représentations théâtrales populaires, les Mystères.

Elle prenait donc la forme d'échanges verbaux — le plus souvent de quatre lignes — entre la Mort et 24 personnes rangées par ordre hiérarchique. Un rôle prépondérant y était vraisemblablement attribué aux sept frères macabres, à leur mère et à Eléasar. Une représentation eut d'ailleurs lieu à Paris dans le cloître des Innocents en leur mémoire. D'où le nom consacré en latin de chorea macabæorum (danse macabre). D'autres théories prétendent que le mot « macabre » vient de l'arabe makabir qui signifie "tombeaux" ou "cimetière", ou encore d'un peintre du nom de Macabré. La prédication des Ordres mendiants contribua à la diffusion dans la chrétienté de ce thème du destin inéluctable de l'homme et de l'égalité de tous devant la mort.

* L'une des plus anciennes figurations de Danse macabre connue apparaît à Paris, en 1424, sur les murs du charnier du cloître des Saints Innocents. Cette fresque, aujourd'hui détruite[2], ne comportait que des hommes[3]. Elle nous est parvenue à travers des gravures populaires que l'on retrouve dans le Manuscrit de Blois, au Cabinet des Estampes de la Bibliothèque nationale de France.

* Vers 1440, le moine anglais John Lydgate traduisit le poème et recopia la représentation du charnier des Saints Innocents sur l'église Saint Paul de Londres[4]. Le thème de la Danse macabre se diffusa ainsi en Angleterre.

* On retrouve autour de 1460, dans l'église de Lübeck, une Danse macabre apparue lors du passage de la « mort noire » (la peste). Cette peinture murale de la chapelle de la mort fut en partie annotée par Bernt Notke. Les vers en allemand populaire ont partiellement été conservés jusqu'à aujourd'hui.

La danse macabre y est représentée sous sa forme la plus simple : 24 figures humaines, ecclésiastiques et laïques, dans l'ordre décroissant de pape, empereur, impératrice, cardinal, roi, jusqu'au paysan, jeune homme, jeune femme et enfant. Chaque personnage y danse toujours avec son mort.
Cette fresque fut détruite au cours de la Seconde Guerre mondiale. Deux vitraux réalisés par Alfred Mahlau en 1955-1956 rappellent aujourd'hui dans cette chapelle ce chef-d'œuvre disparu.

* À partir du milieu du XVe siècle, de nouvelles fresques apparaissent. Elles sont exécutées dans les églises d'Amiens, d'Angers, de Dijon ou de Rouen, aussi bien sur le sol que sur les façades.

* Dans l'Espagne médiévale, les Danzas de la Muerte sont représentatives de la crise des Espagnes au sortir du bas Moyen Âge.

« A la dança mortal venid los nascidos
que en el mundo soes de qualquier estado;
el que non quisiere a fuerça de amidos
facerle e venir muy toste parado.
Pues ya el freire vos ha pedricado
que todos vayais fazer penitencia,
el que non quisiere poner diligencia
por mi non puede ser mas esperado. »

Illustrations

Danse macabre de Holbein:







L'une des danses macabres extraits de la Danse macabre du cloître des Saints Innocents


Détail de la Danse macabre de l'église Saint-Germain de La erté-Loupière dans l'Yonne.


Fragment de la Danse macabre de Bernt Notke pour Rīga aujourd'hui dans le musée de Tallinn.
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/5/58/Bernt_Notke_Danse_Macabre.jpg/1500px-Bernt_Notke_Danse_Macabre.jpg

Vous pouvez voir sur ce site la grande fresque de danse macabre de la chapelle de Kermaria dans les côte d'armor:

http://www.lamortdanslart.com/danse/France/Kermaria/dm_kermaria.htm

Pour les images qui dépassent les 800px de large merci de mettre une miniature et/ou un lien vers l'image en taille réelle. Cela évite d'avoir besoin de faire un usage fastidieux et inconfortable de la barre de défilement horizontale. Merci, Ace.

Article très instructif sur cet art .

Si vous lisez un texte entier de "danse macabre" c'est excellent, je trouve ! Même si c'est un peu répétitif... Les différents personnages essaient d'échapper à la mort... mais les squelettes les entraînent, et rien ni personne ne peut y échapper : pas le pouvoir des rois, pas la richesse des nobles, pas le courage des chevaliers, pas la dévotion des prêtres, pas l'humilité des mendiants, chaque personnage a une réplique qui correspond à sa profession où à son état social, c'est assez touchant.

De plus, les personnages sont illustrés de manière explicite, avec leurs costumes et attributs.

En ce cens c'est une vraie mine d'or pour voir et découvrir tous les gens, une femme en tant qu'épouse/ mère/ couturière/ amante coupable/ par ex, sous plusieurs points de vue !

Les Danses acabres ont eu un réel succès, diffusées par les colporteurs, quand le succès de l'imprimerie a permis l'édition de petits livres pas trop chers (mais on n'est plus dans le moyen-âge, là) c'est vraiment un thème qui "intéressait" tout le monde, même les gens moins aisés ou vivant à la campagne.

Il y a plusieurs styles de dessin pour les danseurs, allant du simple squelette au corps décharné en début de décomposition, jusqu'aux illustrations franchement dégoutantes, avec de la vermine et des bestioles qui sortent par les orbites ou grouillent dans les viscères...

Si vous avez l'occasion de vous pencher là-dessus, n'hésitez pas car, du point de vue, religieux, sociologique et artistique, c'est passionnant :!

Exellent post, comme toujours !

Interessant!
J'aime cette idée "d'égalité" devant la mort, plus de classes sociales, plus rien..

Bah on est tous pareil devant la mort, enfin pour moi.
Quelque soit tes possesions, elle viendra forcément te chercher.

Reste a voir comment elle viendra et comment tu veux qu elle vienne. . .

On retrouve d'ailleurs cette idée très chrétienne de nudité devant la mort ou d'égalité dans les représentations des jugements dernier sur les façades des églises où l'on peut voir des personnes de toutes classes.

Bravo pour la présentation de ce thème très intéressant!

Il y a 2 excellents ouvrages sur les Danses Macabres:
* Le Que sais - Je? d'André Corvisier
* Itinéraires des Danses Macabres d'Hélène & Bertrand Utzinger, magnifiquement illustré.


Les Danses Macabres étaient surtout très présentes en Allemagne et ce jusqu'au XVIIIeme siècle, alors qu'en France dès la Renaissance et en particulier, lors des Guerres de Religion, elles ont été pour la plupart, couvertes par un badigeon blanc. Il ne restent que quelques sites en France bien conservés tel que la danse macabre de la Chaise Dieu ( XV eme siècle), de Kermaria , de Kernascléden toutes deux en Bretagne ( XV eme s.) et de La Ferté Loupière ( Yonne, début XVI es.).
En Italie, elles étaient très peu présentes, à cause du Quatrocento, qui annonce déjà la Renaissance. Il n'y a qu'à lire le Décameron de Boccace ( XIV eme s.) pour voir que l'état d'esprit n'est pas le même puisqu'il se concentre sur l'être humain, son comportement et ses capacités qui lui permettent de s'adapter aux aléas de la vie et d'en abattre les obstacles. Récits de nouvelles dont l'élément déclencheur est la peste Noire qui s'abat sur Florence en 1348.

L'iconographie dite "macabre" va effectivement beaucoup se développer aux XIV eme XV eme siècle, à cause notamment des effets dévastateurs de la pandémie de Peste Noire ( la plus importante étant celle de 1347 à 1349 mais qui aura encore des répercussions plus locales mais toutes aussi meurtrières jusqu'au XVIII eme siècle; le dernier cas étant celui de Marseille en 1720), en plus de la famine et de la guerre. Le rituel rassurant des funérailles va être fortement perturbé où le chrétien mourra sans les derniers sacrements, faute de prêtres, et sans sépulture, faute de bras pour les porter jusqu'aux fosses communes aménagées à cet effet. Et c'était justement ce que craignait le plus l'homme médiéval! Mort en état de péché et sans sépulture décente était normalement le lot des gens proscrits et excommuniés.

La danse macabre prend sa source dans le Dict des 3 morts et des trois Vifs qui apparaît vers la deuxième moitié du XIII eme siècle où trois jeunes gens à pied puis de jeunes cavaliers parés de leur beaux atours rencontrent 3 squelettes plus ou moins en état de putréfaction qui les interpellent et les mettent en garde contre leur inutile vanité et leurs manières dissolues. Ces cadavres prendront la parole à tour de rôle pour démontrer à ces jeunes jouvenceaux que leurs beaux habits ne servent à rien, puisqu’en terre ils pourriront. Ils les enjoignent à changer de conduite, de faire des bonnes actions, car c’est en faisant des bonnes actions qu’ils peuvent gagner le paradis. On imagine bien nos trois seigneurs, qui après avoir été saisis d’effroi retournent, tout penauds, dans leur château, méditer cette belle leçon de morale...

Avec la Danse Macabre, vont se développer les Triomphes de la Mort montée sur un char et qui écrase tout le monde sur son passage, sans aucune distinction mais nombre d'Ars Moriendi ou l'art de bien mourir. bien sûr, ce thème est aussi très présent en littérature, notmment chez Jean Le Fèvre ( Le Respit de la Mort) .La Peste elle même est figurée sous la forme d'un cavalier noir qui tire des flèches au hasard sur les pauvres infortunés qui se trouvent sur son chemin.