Forum Médiéval Fantastique
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

Forum Médiéval Fantastique

Forum de discussion autour du Moyen-âge et du Médiéval fantastique
Graphismes et Design réalisés par Ace, logo FMF par Duchesse de Bretagne, logo Qui est en Ligne par Diane de Brocéliande.
 
AccueilAccueil  PortailPortail  RechercherRechercher  S'enregistrerS'enregistrer  MusiqueMusique  ConnexionConnexion  
-55%
Le deal à ne pas rater :
Coffret d’outils – STANLEY – STMT0-74101 – 38 pièces – ...
21.99 € 49.04 €
Voir le deal

 

 LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe

Aller en bas 
2 participants
AuteurMessage
Dame Frédégonde
Baron, Baronne
Baron, Baronne
Dame Frédégonde


Nombre de messages : 481
Age : 112
Lieu d'origine : Annwyn
Date d'inscription : 12/02/2011

LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Empty
MessageSujet: LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe    LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Icon_m18Sam 14 Jan 2012 - 17:19

Voici un fabliau du XIII eme siècle qui concentre le thème du mariage -peu courant- où les deux conjoints sont issus d'une classe sociale différente. Il arrive parfois pour des raisons pécuniaires que les chevaliers soient réduits à concevoir un mariage avec les bourgeois, beaucoup moins prestigieux mais plus fortunés. L'entretien d'un château et l'équipement militaire coûtaient fort chers au XIII eme siècle et il arrivait parfois que les chevaliers se trouvaient dans la misère la plus noire tout en conservant cette part d'orgueil lié à leur rang qui tend à mépriser les couches sociales dites "ordinaires" , dont fait partie la bourgeoisie.
Les aspects les plus sombres de l'âme humaine sont également mis en lumière, à savoir la cupidité et l'ingratitude: pour satisfaire sa Dame, le bourgeois est prêt à mettre son propre père à la rue! C'est son fils qui lui fera prendre conscience de son acte si peu charitable!

Mais lisez plutôt:

"Je vais aujourd'hui vous conter l'histoire d'un riche bourgeois d'Abbeville. Cet homme avait des terres, et beaucoup de biens.
Mais il advint que tout le pays fut ravagé par la guerre. Par crainte des ennemis, il quitta sa ville avec sa femme et son jeune fils, et vint à Paris.
Cet homme d'honneur était sage et courtois, la dame fort enjouée, et le jeune homme n'était ni sot ni malappris. Aussi les voisins furent-ils très heureux de les accueillir. On les tenait en grande estime. Le bourgeois faisait commerce, achetant et revendant les denrées si habilement, qu'il accrut beaucoup son bien.
Il vécut ainsi fort heureux, jusqu'au jour où il perdit sa compagne. Le jeune garçon, qui était leur seul enfant, en fut très attristé. Il parlait sans cesse de sa mère. Il pleurait, il se pâmait. Si bien que son père chercha à le réconforter.
- Beau doux fils, lui dit-il, ta mère est morte ; prions Dieu qu'il prenne son âme en pitié !
Mais sèche tes yeux, mon enfant, car de pleurer ne sert à rien. Te voilà bientôt chevalier, et d'âge à prendre femme. Nous sommes ici en terre étrangère, loin de nos parents et de nos amis. Si je venais à disparaître, tu te trouverais bien seul, dans cette grande ville.
Aussi voudrais-je te voir marié. Il te faut une femme bien née, qui ait oncles, tantes, frères et cousins, tous gens de bon aloi. Certes, si j'y voyais ton bonheur, je n'y ménagerais guère mes deniers.
Or, devant la maison du prud'homme habitait une demoiselle hautement apparentée. Son père était un chevalier fort expert au maniement des armes, mais qui avait mis en gage tous ses biens et se trouvait ruiné par l'usure.
La fille était gracieuse, de bonne mine, et le prud'homme la demanda à son père.
Le chevalier, de prime abord, s'enquit de sa fortune et de son avoir. Très volontiers, il lui répondit :
- J'ai, tant en marchandises qu'en deniers, mille et cinq cents livres vaillants. J'en donnerai la moitié à mon fils.
- Hé ! beau sire, dit le chevalier, si vous deveniez templier, ou moine blanc, vous laisseriez tout votre bien au Temple ou à l'abbaye. Nous ne pouvons nous accorder ainsi ! Non, sire, non, par ma foi !
- Et comment l'entendez-vous donc ?
- Il est juste, messire, que tout ce que vous possédez, vous le donniez à votre fils. À cette seule condition, le mariage sera fait.
Le prud'homme réfléchit un temps.
- Seigneur, j'accomplirai votre volonté, dit-il.
Puis il se dépouilla de tout ce qu'il avait au monde, ne gardant pas même de quoi se nourrir une journée, si son fils venait à lui manquer.
Alors le chevalier donna sa fille au beau jeune homme.
Le prud'homme vint demeurer chez son fils et sa bru. Ils eurent bientôt un jeune garçon, aussi sage que beau, plein d'affection pour son aïeul ainsi que pour ses parents.
Douze années passèrent. Le prud'homme devenait si vieux qu'il lui fallait un bâton pour se soutenir. Comme il était à la charge de ses enfants, on le lui faisait cruellement sentir. La dame, qui était fière et orgueilleuse, le dédaignait fort. Elle le prit si bien à contrecoeur qu'enfin elle ne cessait de répéter à son mari :
- Sire, je vous prie, pour l'amour de moi, donnez congé à votre père. En vérité, je ne veux plus manger, tant que je le saurai ici. [...]


Dernière édition par Dame Frédégonde le Sam 14 Jan 2012 - 17:26, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
Dame Frédégonde
Baron, Baronne
Baron, Baronne
Dame Frédégonde


Nombre de messages : 481
Age : 112
Lieu d'origine : Annwyn
Date d'inscription : 12/02/2011

LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Empty
MessageSujet: Re: LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe    LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Icon_m18Sam 14 Jan 2012 - 17:24

Le mari était faible et craignait beaucoup sa femme. Il en fît donc bientôt à sa volonté.
- Père, père, dit-il, allez-vous-en. Nous n'avons que faire de vous : allez vous punir ailleurs ! Voilà plus de douze ans que vous mangez de notre pain. Maintenant, allez donc vous loger où bon vous semblera !
Son père l'entend, et pleure amèrement. Il maudit le jour qui l'a vu naître.
- Ah ! beau fils, que me dis-tu ? Pour Dieu, ne me laisse point à ta porte. Il ne me faut guère de place. Pas même de feu, de courtepointe, ni de tapis. Mais ne me jette pas hors du logis : fais-moi mettre sous cet appentis quelques bottes de paille. Il me reste si peu de temps à vivre !
- Beau père, à quoi bon tant parler ? Partez et faites vite, car ma femme deviendrait folle !
- Beau fils, où veux-tu que j'aille ? Je n'ai pas un sou vaillant.
- Vous irez de par la ville. Elle est, Dieu merci, assez grande, vous trouverez bien quelque ami, qui vous prêtera son logis.
- Un ami, mon fils ! Mais que puis-je attendre des étrangers, quand mon propre enfant m'a chassé ?
- Père, croyez-moi, je n'y peux rien, ici je n'en fais pas toujours à ma volonté.
Le vieillard a le coeur meurtri. Tout chancelant, il se lève et va vers le seuil.
- Fils, dit-il, je te recommande à Dieu. Puisque tu veux que je m'en aille, de grâce, donne-moi quelque couverture, car je ne puis souffrir le froid.
L'autre, tout en maugréant, appelle son enfant.
- Que voulez-vous, sire ? dit le, petit.
- Beau fils, va dans l'écurie, tu y prendras la couverture qui est sur mon cheval noir, et l'apporteras à ton grand-père.
L'enfant cherche la couverture, prend la plus grande et la lus neuve, la lie en deux par le milieu, et la partage avec son couteau. Puis il apporte la moitié.
[...]- Enfant, lui dit l'aïeul, tu agis laidement. Ton père me l'avait donnée toute.
- Va, dit le père, Dieu te châtiera. Donne-la tout entière.
- Je ne le ferai point, dit l'enfant. De quoi plus tard seriez-vous payé ? Je vous en garde la moitié, car vous-même de moi n'obtiendrez pas davantage. J'en userai avec vous exactement comme vous l'avez fait avec lui. De même qu'il vous a donné tous ses biens, je veux aussi les avoir à mon tour. Si vous le laissez mourir misérable, ainsi ferai-je de vous, si je vis.
Le père hoche la tête en soupirant. Il médite, il rentre en lui-même.
- Sire, dit-il, rebroussez chemin. Il faut que le diable m'ait poussé, car j'allais commettre un péché mortel. Grâce à Dieu, je me repens. Je vous fais à tout jamais seigneur et maître en mon hôtel. Si ma femme ne peut le souffrir, ailleurs je vous ferai bien servir. Vous aurez toutes vos aises, courtepointe et doux oreiller.
" Par saint Martin, je vous le dis, je ne boirai de vin ni ne mangerai de bon morceau, que vous n'en ayez de meilleur. Vous aurez une chambre privée, et à bon feu de cheminée. Vous aurez une robe telle que la mienne. À vous je dois fortune et bonheur, beau doux père, et je ne suis riche que de vos biens.
" Seigneurs, la leçon est bonne, croyez-m'en. Tel qui jadis s'est dépouillé pour son enfant subit trop souvent le sort de ce bourgeois."

Comme quoi reléguer les vieilles personnes à leur plus vile indigence vers une mort certaine, par mépris, par cupidité ou par ingratitude n'est pas qu'un phénomène actuel...
Revenir en haut Aller en bas
aragorn
Duc, Duchesse
Duc, Duchesse
aragorn


Nombre de messages : 1776
Age : 61
Lieu d'origine : Giroux Vieux (Auvergne)
Date d'inscription : 30/10/2010

LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Empty
MessageSujet: Re: LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe    LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Icon_m18Sam 14 Jan 2012 - 18:09

Disons que maintenant, c'est plus organisé! Et je pense cependant que cette fable bien-pensante a seul but d'interpellé la moralité des jeunes gens et que la situation qu'elle décrit était assez exceptionnelle.
Revenir en haut Aller en bas
http://dessinsfantasy.wordpress.com/
Dame Frédégonde
Baron, Baronne
Baron, Baronne
Dame Frédégonde


Nombre de messages : 481
Age : 112
Lieu d'origine : Annwyn
Date d'inscription : 12/02/2011

LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Empty
MessageSujet: Re: LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe    LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Icon_m18Dim 15 Jan 2012 - 12:16

En effet,il y a toujours une morale dans les fabliaux . Mais l'auteur en profite aussi pour se moquer de certaines classes sociales ou bien des relations hommes femmes dans un couple ( où la femme a très souvent le mauvais rôle d'ailleurs)... La réalité peut donc être malgré tout dépeinte car la motivation première du fabliau est celle de divertir outre l'aspect "moralisateur". Car si les personnages n'ont pas de véritable densité psychologique, l' auditoire pouvait, à travers les traits de tel ou tel acteur du fabliau, dans ses défauts et ses manies, reconnaître son voisin, un membre de la famille, le curé du village ou bien son propre seigneur. C'est pourquoi, les fabliaux étaient alors très populaires.

Par exemple, dans un fabliau anonyme du XIII eme siècle " le curé qui mangea les mûres ", le curé est pris en flagrant délit de gourmandise alors que l'Eglise condamne ce péché capital . Cependant, les hommes et femmes de cette époque devaient beaucoup s'en amuser parce qu'effectivement, ils devaient connaître un curé ou un moine bien ventripotent qui profitait des biens terrestres dans leur entourage... Mon exemple est un peu "bateau", il est vrai, tant on a disserté sur la gourmandise des prêtres et des moines...

... mais mais je peux le prouver lol!

LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Drinker
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Empty
MessageSujet: Re: LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe    LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe  Icon_m18

Revenir en haut Aller en bas
 
LA HOUSSE PARTIE ou la couverture partagée Fabliau du XIIIe
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Couverture de livre
» Présentation du costume XIIIe.
» Réalisation : Bouclier cintré deuxième moitié du XIIIe

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Forum Médiéval Fantastique :: Autour du Donjon :: La Bibliothèque :: Les Grimoires-
Sauter vers: