J'ai lu les 2/3 du livre (200 sur 300), cependant, je suis impatient de commencer "la Femme au temps des cathédrales" du même auteur, alors je stoppe ma lecture pour l'instant.
Brève présentation : Régine Pernoud à écris ce livre en collaboration avec Jean Gimpel et Raymond Delatouche (deux spécialites sur l'agriculture au Moyen Age). Parut en 1986, celui-ci à pour but de montrer combien cette époque fut une période de dévellopement, et particulièrement au niveau de l'agriculture. Ce livre se veut avec un but pratique, faire bénéficier ce savoir de l'agriculture médiévale aux pays du tiers monde. Il ne s'agit pas d'une théorie. Ce livre s'appuie sur l'expérience de Jean Gimpel, qui a parcouru l'Afrique, l'Asie, le Kenia et le Népal avec ses maquettes médiévales, afin d'y aider les indigènes (dans le sens noble du terme) ce qui ce solda par un grand succès. "Sa conviction est qu'en maints pays le dévellopement technologique n'a pas atteint le degré qu'avait atteint notre XIII e siècle; or il semble illusoire de faire l'économie des étapes indispensables. Le fils du paysans du Dordogne peut aller à Toulouse faire Sup-Aéro, (École nationale supérieure de l'aéronautique et de l'espace) mais c'est parce que depuis dix siècles ses ancêstres ont su atteler leur cheval et actionner le moulin de la forge. Cette étape indispensable, elle n'a pas été ménagée aux paysans de Centre Afrique que l'avion visite quotiennement; or on retarde le moment où eux-mêmes seront capables de piloter l'avion en ne leur fournissant pas l'occasion d'aménager leur moulin, de perfectionner leur agriculture et, ce faisant, de dévelloper lees cultures vivirières qui leur permettront d'éloigner la famine". Ce livre est donc originale, et j'y ai beaucoup appris sur l'organisation de l'agriculture au moyen-âge. Après avoir lu cela, personne ne pourra me convaincre à présent que le moyen âge fut une époque obscurantiste de sous dévellopement, oh non
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Citations :Voici quelques citations qui m'ont marquées au cours de ma lecture. Je les aient retenues car elles sont instructives et parfois synthétiques. Mais rien ne vaut de lire le livre par soi-même. Ces citations ne sont qu'un tout petit aperçu et ne résument en rien celui-ci
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Egalité de l'homme et de la femme (p.45):"Si l'esclavage est aujourd'hui interdit, en pincipe en tout cas, il semble qu'il y ait beaucoup à faire pour amener la situation respective de l'homme et de la femme à l'équilibre qui a caractérisé notre civilisation féodale. Car les droits que la femme exerce alors, en tant que telle, la rendent pratiquement autonome. Les deux partenaires jouissent de droits et de devoirs très différenciés, qui font d'eux des égaux, bien que très dissemblables.
La tendance aujourd'hui en Occident serait de confondre "égal" et "semblable", de nier contre toute évidence des différences essentielles, de ne concevoir l'égalité que dans la similitude, ce qui relève d'un raisonnement assez sommaire auquel les faits apportent un démenti constant. une publicité qui paraissait assez souvent à la télévision dans les années 82-83 montrait une jeune femme et un jeune homme arrivant ensemble au bout d'une même course d'obstacles, cela pour appuyer les revendications de "travail égal, salaire égal"; image particulièrement mal choisie, car dans certaines catégories de sport, aux jeux Olympaiques, aucne femme n'obtiendrait la moindre médaille si elle participait aux mêmes épreuves que les hommes ; publicité mensongère donc." (Fine analyse de Régine Pernoud, auteur de : "la Femme au temps des Cathédrales".)
Le Moyen Age et son image de sous-développement (p.56)."Reste que, pour le public dans son ensemble, le "Moyen Age" est une époque de sous-développement; c'est même par excellence l'
époque de sous-développement. Nous nous étions quelque temps amusée à dénoncer l'évident paradoxe sour la forme d'un slogan publicitaire : " Le Moyen Age : la seule époque de sous-développement pendant laquelle on ait bâti des cathédrales !" ".
(p.57)
"Sur un point pourtant reste un progrès à faire : établir le rapprochement qui s'impose, tant du point de vue de la science historique que du bon sens, entre cette efflorescence artistique dont témoigne le passé médiéval et le développement qu'elle suppose. Apprécier la lyrique courtoisie tout en continuant à croire qu'elle émane de gens ignares, les cathédrales en imaginant qu'elles furent bâties par une population sous-alimentée, les châteaux et les villes tout en supposant une pauvreté généralisée, cela ne devrait pas résister à une heure de réflexion. "Quand le bâtiement va, tout va", dit la sagesse des Nations. "
(p.59)
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Quels bâtisseurs ? Et ceci explique cela : nous voulons dire qu'il serait totalement illogique de supposer des cathédrales jaillissant sur des sols en friche dans des campagnes désertiques et peuplées dindividus sous-alimentés. On s'étonne toujours de la facilité avec laquelle notre époque, qui se croit rationnelle et cartésienne, accepte les paradoxes les plus flagrants, pourvu qu'ils soient doctement rédigés par des auteurs de manuels d'histoire ou signés quelquefois par des universitaires ferrés dans leur spécialité, mais souvent étrangers, par exemple, à la pratique de l'histoire du droit privé, capitale cependant pour la connaissance des moeurs; en revanche, on les trouve généralement fort perméables aux lieux communs sur lesquels a été enseignée l'histoire depuis quatre siècles et fort influençables aussi par les auorités régnantes, celles qui ont voix au chapitre et dont dépendront les thèses et les réussites aux examens. Plus d'une fois nous aurons constaté avec surprise chez tel agrégé d'histoire l'incapacité à distinguer entre la loi et la coutume, par exemple, ou encore à apprécier tout ce qui sépare le roi féodal du monarque absolu."
Sur la société médiévale (p.58 ) " Nous ne voulons pas empiéter sur l'étude de Raymond Delatouche, qui accumule patiemment les détails concrets tirés des documents d'archives et d'une profonde expérience de la vie rurale sous ses diverses formes, et laisson au lecteur le soin d'apprécier à travers les pages si denses qui vont suivre, les moyens qui ont amené les temps féodaux à une propérité que ne faisait aucunement prévoir la fin du IXe sicèle - époque de terreur qui va du siège de Paris par les Normands en 886, à l'expulsion des "Sarrasins" destructeurs de monastères et fauteurs de prise d'otages en 972. Raymond Delatouche nous dévoile, chiffres à l'appui, les éléments de cette prospérité et les conditions dans lesquelles elle s'est affermie et manifestée : les stuctures féodales, le régime du travail et celui de la propriété, les inventions originales et souvent pleines de hardiesse qui ont assré une saine répartitionde la population ; un régme dans lequel le non-possédant peut encore trouver pleindement sa place, le soin enfin des déshérités, de ceux qui ne peuvent pas se suffire à eux-mêmes, avec pour finir les céations du temps : l'économie de marché, l'expansion des villes exactement contemporaine de celle des châteaux - en bref, toute une activité née d'un sage empirisme, hors de toute théorie préétablie, imprégnée en revanche de respect de l'homme et de son environnement dont nous pouvons aujourd'hui aprécier la nécessité". (Voici un passage pour donner l'eau à la bouche, car en effet, tout sera décri et expliqué point par point dans la suite du livre).
Les constructions médiévales, faites par des esclaves ou des salariés ? (p.62)Reste qu'on entendait encore, il n'y a pas si longtemps, des assertions simplistes : les cathédrales gothiques, par exemple, ne pouvaient avoir été bâties que par des esclaves, comme les pyramides, ou par de pauvres hères "corvéables à merci". Mais nos archives recèlent trop de rôles de paiement d'ouvriers libres et salariés pour laisser la moindre place à une telle hypothèsee. Elle pouvait venir à l'esprit des gens aux XIXe et XX siècles, lorsque, même si l'on avait aboli l'esclavage (ce qui fut fait, on le sait, en 1848 pour ce qui concerne les possessions françaises outre-mer), on avait conservé le travail forcé, la corvée : c'est-à-dire que les masses de main-d'oeuvres transplantées, par exemple pour la construction du barrage du haut Niger, n'étaient pas payées et devaient être nourries par leurs familles pendant tout le temps de ce travail. Le travail forcé dans les territoires d'outre-mer n'a été aboli qu'en 1946 (loi du 5 Avril 1946) par le général de Gaulle. On peut se demander si l'on en célébrera le 40e anniversaire comme on a célébré celui du Débarquement. Quoi qu'il en soit, n'était-ce pas pour "se dédouaner" inconsciemment qu'on le croyait partout pratiqué durant l'époque féodale ?
Elevés par des travailleurs libres et salariés, châteaux dans les campagnes, trempart dans les villes, églises partout attestent une prospérité générale provenant avant tout du travail de la terre, d'une ingénieuse et méthodique exploitation de ses ressources. C'est ce que nous exposent les pages qu'on va lire."
La productivié agricole médiévale éguale à celle des années 1840 ! (p.76)" Ce calcule ne vaut que pour un rendement moyen, en culture attelée, de 12qx/ha. Au-dessous de ce seuil, la productivité par travailleur est supréreure dans la culture à la main ; au-dessus, elle est inférieure. Mais 12qx/ha, on peut penser que c'est la moyenne : ce sera celle de la France en 1840."
L'importance de la coutume et la notion de service. (p.101-102)"
Non la loi mais la coutumeLa coutume, tradition vivante, a cet immense avantage de se mouler sur l'évolution sociale et économique, sur les particularismes ethniques, régionaux, voire locaux, qui s'expriment également dans la variété des dialectes ; la coutume possède aussi l'avantage de trier, dans les être conservé, ce qui n'était qu'occasionnel et peut être oubilé, ce qui est déviation et doit être éliminé.
Que dit la coutume en cas de litige ? La comunauté de intéressées, où la règle de la majorité est tempérée par l'autorité personnelle. La
sanior pars , la partie la plus célairée, peut faire échec à la
major pars , le grand nombre. La
sanior pars, ce sont évidemment les anciens, ceux qui ont les plus lointains souvenirs, qui ont accumulé le plus d'expérience ; ce sont les prud'hommes, les sages reconnus comme tels, les jurisconsultes réputés, ceux à qui l'on confie volontier les arbitrages, les procurations, les tutelles. Les
Coutumes de Clermont-en-Beauvaisis (v. 1280) tirent leur crédit de la considération méritée par leur rédacteur, Philippe de Beaumanoir, haut fonctionnaire de Saint Louis, un beau type d'homme de ce temps.
Un tel système postule un climat d'unanimité morale, d'accord général sur ce qui est bien et ce qui est mal, sur ce qui se fait et ce qui ne se fait pas, sur des principes reconnus par ceux-là mêmes qui les transgressent, la transgression témoigant
a contrario de la règle.
Cette unanimité repose sur le principe fondamental de la féodalité dès son origine foncière : la notion de service. Seigneurs et sujets sont liés par une obligation mutuelle de servcies : protection due par le seigneur - défense extérieure et justice intérieure ; assistance,
aide des sujets pour l'exécution de ce service, le bien commun étant le critérium suprême des uns et des autres.
Pour Beaumanoir, c'est la protection des faibles contre les aristocraties locales qui justifie l'intervention du seigneur dans les communes de son fief : " Chaque seigneur qui a bonnes villes dessous lui doit savoir chaque année l'état de la ville et comment elle est gouvernée...; et il est très utile, parfois, que l'on vienne au secours desdites villles, comme on ferrait de l'enfant mineur."
Cette notion est présente à Joinville quand il blâme Saint Louis de repartir pour sa seconde croisade et qu'il se refuse à le suivre. Au moins en use-t-il pour se donner bonne conscience : "Et je leur disais que, si je voulais travailer au gré de Dieu, je devais demeurer ici pour aider et défendre mon peuple".
Perception de l'hérésie par le peuple (p.103)."L'unanimité est cimentée par le respect congénital de la tradition éprouvée, et surtout par la communauté de foi, la foi chrétienne ; l'accord général sur la morale, la morale chrétienne, le magistère de l'Eglise, incontesté en matière spirituelle; la ferme croyance en un jugement dernier, dont la rigeur, tempérée de misécorde, est solennellement rappelée au tympan des cathédrales.
Ainsi s'expliquent la répulsion spontanée pour l'hérésie, la tendance auss à taxer d'hérétique tout mouvement contestataire. Ce n'est pas fanatisme dogmatique inspiré pour un clergé crispé, mais réaction populaire contre l'ébranlement de l'ordre sociale. La déviation doctrinale est une menace contre la société que souvent le peuple est le premier à percevoir."