Une Histoire Légendaire...La Chanson de Roland (laisses CCXI-CCXIII)
Une page du manuscrit d'Oxford (deuxième quart du XIIe siècle), conservé à la Bodleian Library.--------------------------------------------------------------------------------------
L'empereur Charlemagne régnait glorieusement depuis plusieurs années
en France et combattait maintenant avec succès les Sarrasins en
Espagne. Il avait ainsi déjà conquis de nombreuses villes espagnoles,
mais à Saragosse le roi sarrasin Marsile se maintenait fermement.
L'empreur avait tenu un long siège devant la ville, mais sans résultat. Et
il fut bien soulagé quand enfin Marsile lui-même proposa de conclure la
paix, promettant de se soumettre en définitive aux Français. heureux de
la tournure des événements, Charlemagne lui envoya alors son conseiller
Ganelon, pour discuter et régler les conditions de paix. L'empreur promit
alors de retirer ses troupes devant Saragosse et de retourner en France.
Mais. Marsile était fourbe, et Ganelon avide de richesses. Pour sept
cents chameaux chargés d'or et d'argent, Ganelon trahit Charlemagne et
lui conseilla de laisser une arrière-garde, quand il quitterait l'Espagne
pour couvrir sa retraite vers la France. Composée des plus vaillantes
troupes de Charlemagne, lcelle-ci devait emprunter un étroit défilé dans
les Pyrénées, et c'est là au col de Roncevaux que les Sarrasins tendirent
leur embuscade afin d'exterminer les dernieres troupes de Charlemagne.
Privé ainsi ses meilleurs soldats et chevaliers, l'empereur pourrait
difficilement revenir en Espagne et entreprendre de nouvelles
campagnes contre les Sarrasins.
Charlemagne suivi donc le conseil de Ganelon, et retournant dans son
pays, il laissa derrière lui, vingt mille de ses meilleurs combattants pour
couvrir sa retraite, en tête desquels se trouvait son propre neveu, le
valeureux Roland, avec son ami Olivier et l'archevêque Turpin.
Et il arriva ce que le roi Marsile avait comploté avec le traître Ganelon.
Une très nombreuse armée de Sarrasins assaillit l'arrière-garde des
Français à l'improviste. Les Sarrasins supérieurs en nombre, car Marsile
avait reçu des renforts de l'empereur Boligant lui-même, ainsi que des
soldats de Jéricho, d'Afrique, de la terre Turque, des Perses et des Huns.
Certains étaient hirsutes comme des porcs, d'autres avaient la tête
plantée directement sur les épaules. D'autres encore avaient la peau si
dure qu'ils n'avaient besoin ni de cuirasse ni de bouclier. Et parmi ces
hommes-là il y en avait de si forts qu'ils pouvaient, à mains nues, briser
une lance, broyer un bouclier ou fendre le crâne d'un ennemi.
Roland, fais sonner ton olifant, conseilla Olivier à son ami.
Le
roi nous entendra, et il reviendra à notre secoursMais Roland répondit :
Le roi nous a laissés ici avec vingt mille hommes, et parmi nous il n'y
a pas un seul peureux. Nous soutiendrons la lutte seuls.Mais le sage Olivier mit encore Roland en garde :
L'ennemi est très nombreux. Sa supériorité en nombre est incalculable.
Sonne de ton olifant!Mais Roland refusa encore, et il refusa Bataille de Roncevauxd'accéder à
une troisième prière d'Olivier. Ainsi eut lieu la terrible bataille du défilé
de Roncevaux, dans les Pyrénées. Les Français se battaient avec un très
grand courage. Roland, Olivier et Turpin avaient déjà asséné des milliers
de coups. Les ennemis tombaient de leur monture, celui qui ne pouvait
fuir ne trouvait point de pitié. Mais qu'était-ce que la valeur des
Français contre tant et tant d'ennemis! Pour un de tombé, il s'en levait
dix autres, pour dix fuyards accouraient cent cavaliers de la réserve
païenne.
Maintenant, Roland veut bien sonner du cor.
Trop tard, dit d'une voix désabusée le fidèle Olivier.
Quand je t'ai dit de sonner, il était encore temps. Le roi aurait pu être
déjà ici, et nous ne devrions pas mourir aussi inutilement, tous jusqu'au
dernier !!!Mais l'archevêque Turpin s'écria :
Messire Roland et vous, Messire Olivier, cessez donc ces querelles !!!
Que Roland sonne de l'olifant. Certes l'empreur ne pourra nous venir en
aide, mais il pourra nous venger et ensevelir nos corps en terre
chrétienne.Ce fut ainsi que Roland fit enfin résonner son olifant, dans le défilé de Roncevaux.
L'empereur Charlemagne entendit l'appel de l'olifant dans le lointain,
par-delà les montagnes. Il comprit alors que son arrière-garde était
ttaquée, et il devina aussitôt la trahison de Ganelon. L'armée française,
fit immédiatement demi-tour vers les Pyrénées. Charlemagne
chevauchait en tête, les cavaliers lançaient l'anathème contre l'ennemi
félon, et aucun d'eux ne put cacher ses larmes, devant le spectacle de
tant de braves héros dont les cadavres jonchaient le champ de bataille.
La Mort de RolandQuand l'empereur arriva à Roncevaux, le combat était déjà fini. Sur
l'herbe verte, gisaient les vingt,' mille preux de France. Charlemagne et
son armée découvrirent en premier les corps d'Olivier et de Turpin, puis
ils trouvèrent celui de Roland, la tête tournée vers l'ennemi, pour bien
montrer qu'il n'avait point fui : son épée Durandal et son olifant sous son
corps, afin de les protéger de la profanation.
Cependant autour des corps des leurs gisaient encore plus nombreux, les
corps de leurs ennemis. Et sur les Sarrasins, l'empereur et son armée se
jetèrent avec tant de rage que dans cette nouvelle bataille tomba le
traître roi sarrasin Marsile et le fils de l'empereur Boligant. Ce dernier
contemplait avec stupéfaction et désespoir la déroute de sa si grande
armée.
Charlemagne repoussa ce jour les Sarrasins jusqu'à Saragosse : il fit
détruire les portes et s'empara de la fière cité.
La Mort de GanelonLes héros de Roncevaux, Roland, Olivier, l'archevêque Turpin et les vingt
mille combattants furent enterrés solennellement. Leur sacrifice n'avait
pas été vain. L'orgueilleuse et forte Saragosse avait enfin été vaincue,
et la puissance des Sarrasins en Espagne avait subi un coup très rude.
Le traître Ganelon, lui non plus, n'échappa pas à un châtiment juste et
mérité. Tout près de Paris, dans un pré, il fut écartelé et mis en pièces
par quatre forts chevaux.